Wind4life en nav

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winD4life

Un tour de l'Atlantique en famille pendant un an à bord de notre voilier winD4life, un Sun Odyssey 42.1 de 1994.
Un projet de vie... Une aventure qui commence...
Bonne lecture,
Nicolas, Yaël, Yanic et Lola


dimanche 11 décembre 2016

Le lancé du poulpe

11-12-2017

Nous sommes déjà depuis plusieurs jours en mer. Le rythme s’installe. Nico a du mal et je me rends compte que ce n’est peut-être pas son truc les traversées, les quarts, la vie à bord. Il est crevé et il n’arrive pas à se détendre. Son cerveau travaille à plein régime et se met en position d’alerte au moindre bruit suspect. Tous les jours nous découvrons de nouveaux bruits sur Wind4life, mais je vois ça comme quelques chose d’assez logique sur un bateau qui à 23 ans. Le problème des bagues de safran n’est malheureusement pas résolu et nous prenons toujours un peu d’eau qui actionne la pompe de cale régulièrement. Nico est découragé. Tous ça pour ça. « Quel énergie dépensée pour rien » me dit-il. « C’est décidé, je revends le bateau aux Antilles et je rentre en avion! » Je contemple la mer et je ne dis rien. Ca va faire 5 mois que nous vivons sur l’eau et je ne m’en lasse pas du tout. On partage nos quarts comme d’habitude, de 21h à 1h30 pour Nico et de 1H30 à 6h pour moi. Petite différence cette fois-ci car nous avons Yanic dans un quart de 5h30 à 7h qui nous permet vachement  de se reposer. Yanic est ravi de participer à cette veille et il le fait super bien d’ailleurs. Je trouve que le temps passe vite et contrairement à ce que l’on peut croire, les journées ne se ressemblent pas du tout. L’état de la mer et le vent changent régulièrement et ça joue beaucoup sur l’humeur de l’équipage. On nous a vendu une traversée avec une houle longue et régulière et c’est surtout en cuisine que le contraire se fait ressentir. Tous le monde sait que j’adore cuisiner, mais en mer c’est très sportif. Surtout que l’équipage à faim toute les 5 minutes et que le capitaine gourmand me commande des chariots de desserts avec meringues, mousse au chocolat, crème vanille et gâteaux pour combler de douceur son moral un peu raplapla. Tous ce que j’ai tenté de faire comme dessert pour le moment finit en cloug et doubitchou, tellement la mer est capricieuse. C’est moi qui finit par avoir le moral dans les chaussettes en ayant raté mes dessert et n’ayant pas satisfait mon loup de mer. Pas grave, je me rattrape avec une autre douceur plutôt très câline. Un petit moment volé entre 2 quarts vers 1h de mat et nous goutons finalement aux meilleur dessert au monde.

Talitha nous gratte rapidement quelques milles avec leur Allure 44 et surtout avec Maître régatier à bord. Il décide de nous attendre un peu car ils ont pitié de nous en apprenant par les enfants que nous n’avions pas de poulpe mais que des rapalas comme leurre. Apparemment ils viennent de pêcher 3 dorades en une journée et nous toujours rien et ils sont convaincus qu’avec nos petite canne à pêche on restera sans poisson durant toute la traversée. Mais il y a toujours des solutions. Une manoeuvre d’approche s’organise entre W4L et Talitha. En 3h on arrive à la hauteur de leur bateau et Cédric lance du matériel de pêche à ces pauvres marins d’eau douce de W4L. Le lancé est réussi et une belle boulette de fil et 2 beaux poulpes atterrissent dans le cockpit.




On est touché par votre générosité et surtout de penser à notre survie en mer. Ni une ni deux, nous mettons la ligne à l’eau avec un beau poulpe fluo au bout du fil. Lola me signale que la ligne tire. Je pense que nos amis avaient raison. Une belle dorade de 1,05m se laisse attraper par le harpon et meurt avec un coup de gin dans les branchies sur le teck du cockpit. Ca semble cruel mais on s’habitue très vite quand il s’agit de penser à nos estomacs. Nous sommes surexcités et on se lèche déjà les babines. J’en retire de beaux gros filets que je stoke dans le frigo et j’annonce le menu des 3 jours à venir. Dorade avec sa salade de pomme de terre, dorade poché et travaillée en rillette avec du curry et citron du vert. Dorade en tikka masala et du riz. Et je terminerai avec un tartare de dorade crue que j’aurai soigneusement congelé dans mon micro-congélateur afin de préserver nos estomacs et d’éviter la scène d’il y a un mois. La dorade a une chair très blanche très proche de la chair du poulet et j’oblige Lola a en manger un morceau et elle refuse toujours. Je constate que tous ce qui s’appellera poisson fera blocage dans son cerveau. C’est dommage. Ce qui l’amuse par contre, c’est de le pêcher et de le dépecer. Elle remettrait bien la ligne à l’eau rien que pour l'attraper, les charcuter et observer les organes comme l’intestin, le cerveau (pour peu qu’il y en ai un), l’estomac, les yeux, le coeur, les branchies et j’en passe. Non, ce n’est pas du sadisme, c’est juste de la curiosité. Mais en faisant une analyse approfondie de l’anatomie d’un poisson, je comprends mieux qu’elle ne veuille pas le manger. La règle est claire, on mange ce qu’on pêche sinon on ne pêche pas.




Talitha, Talitha de W4L? Vous nous recevez? Ils sont bien loin de la portée VHF et nous voilà vraiment seuls à 4 sur notre coquille de noix qui doit nous transporter jusqu’aux Antilles. Je dormais et je me réveille par un bruit de sifflement aigu. C’est un bruit particulier et familier, donc je ne m’inquiète pas du tout. Ca ressemble au sifflement que les médecins nous émettaient dans les oreilles à travers un énorme casque lors des visites médicales à l’école. Ni une ni deux, je retombe en enfance et il sont là sous la coque du bateau. Je les entends communiquer entre eux et j’ai l’impression qu’ils nous appellent. Quel doux réveil. Je crie depuis mon lit: « Dauphins ! ». Nico, qui est à l’extérieur se fout de moi, rit et me dit: » Mais non, c’est l’alarme de mes instruments que tu entends. Je me lève et je vais voir les enfants dans le cabine à côté et Lola et Yanic entendent les mêmes sifflements. Je sais, je le sens, ils sont là… Nous ne sommes pas seuls… A ce moment là Nico lève la tête de ses instruments et crie: « Dauphins! » Une trentaine de dauphins viennent jouer avec nous. On retombe en enfance et je m’amuse comme Yanic et Lola à les voir sauter, nager, se retourner à l’étrave du bateau. On voudrait sauter à l’eau et les suivre, les toucher, les câliner. Nous sommes restés bien une demi heure à les observer et quand ils ont décidé de nous quitter, ils nous laissent à chaque fois une sensation de réconfort et de bien-être au point d’effacer toutes les mauvaises ondes de nos mémoires. C’est hyper encourageant!


Le soleil brille depuis notre départ et nous n’avons encore aucun grain à l’horizon. Allons-nous garder des conditions idéales jusqu’au bout? Trop beaux pour y croire. Nico m’avoue à demi-mots que la transat ne l’amuse pas et que ça l’inquiète beaucoup. Pour la première fois il me fait part d’un peu de nostalgie. Il a une envie de ski, d’être devant un bon feu ouvert avec une belle assiette de gibier et un bon verre de vin. Il rêve de faire un city trip en amoureux et de manger dans un bon resto gastronomique. Je salive aussi. Les enfants qui nous entendent rigolent et nous ramènent sur terre (enfin sur mer). Au fait, ils se foutent de nous en nous entendant s’extasier face à ce qu’on a pas alors qu’autour de nous c’est juste le paradis. J’adore quand ils nous remettent face à la réalité. Ils sont incroyables ces enfants…

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